Deux oeuvres de Roberta González sont actuellement en vue au Musée de Tessé (Le Mans) dans l’exposition « Marie Raymond et ses amis ».
Cette exposition porte sur Marie Raymond, une artiste-peintre et critique d’art qui était une pionnière de l’abstraction dans l’après-guerre. Malgré son rôle important dans l’abstraction parisienne des années 1950, elle a été largement oubliée par l’histoire de l’art depuis, comme tant d’autres artistes femmes. L’on se souvient d’elle souvent uniquement comme la mère d’Yves Klein, le peintre des monochromes. Cette exposition sort de l’ombre cette figure pionnière en la remettant dans le contexte des artistes qu’elle a fréquenté, suivi en tant que critique, et soutenu, comme Pierre Soulages, Gerard Schneider, Serge Poliakoff, Sophie Warburg (aka Nicolaas Warb), Hans Hartung et Roberta González.
En effet, Roberta González et son mari, Hans Hartung, étaient liés à Marie Raymond par des considérations esthétiques et amicales. Ils ont fêté Noël ensemble en 1948 avec d’autres amis artistes, comme le peintre néerlandais Fred Klein, le marie de Marie Raymond, Yves Klein, et les Soulages, chez les González à Arcueil. Les González-Hartung fréquentait sans doute le salon tenu tous les lundis soir chez Marie Raymond qui rassemblait des artistes abstraits, afin qu’ils échangent autour de leurs préoccupations communes.
Les oeuvres de Roberta González présentées dans l’exposition sont figuratives, et ancrées dans la réalité observée. Et pourtant, Roberta était intéressée et influencée par les diverses formes d’abstraction en vogue alors sur la scène parisienne, dont son mari, Hartung, était l’un des chefs de fil. Au fil des années 1950 , Roberta González cherche à créer un style personnel qui fasse le synthèse entre l’abstraction et la figuration. Ce style trouve sa pleine expression dans les années 1960, dans des peintures dynamiques et colorées.
pastel sur papier, Musée d’Arts de Nantes
Les premisses de cette période de maturité sont visibles dans « Visage » (1952). Le portrait de femme mélancolique, très fréquent dans l’oeuvre de Roberta González dans les années 1940, a été réduit à l’essentiel: les traits du visage sont couverts d’une ombre noire, formée de coups de pinceaux visibles; une simple courbe souligne la partie inférieure du visage autour du menton. Le visage flotte dans un espace non défini, sans aucun détail anecdotique. L’oeuvre communique une gravité sombre.
Cette mélancolie est le reflet d’une femme artiste qui cherche sa place sur la scène parisienne. Comme l’écrit Roberta dans son journal inédit le 19 janvier 1953: « Marie a peint de fort jolies toiles. C’est un être d’une sensibilité exquise—impressionnable et elle aussi déroutée, déchirée entre sa condition de femme et son état d’artiste. Comme il est difficile d’atteindre à une harmonie intérieure! »
L’exposition « Marie Raymond et ses amis » sera présentée au Musée de Tessé (Le Mans) jusqu’au 19 septembre 2021.