TÊTE DITE « LE TUNNEL »

1932 -1933

Médium: Fer, forgé, soudé

Dimensions: 46,7 x 21,8 x 30,9 cm

Tête dite « Le tunnel », ca 1934

Fer coupé, forgé, soudé, 46,7 x 21,8 x 30,9 cm

Tate Modern, London

Un retour au thème des amoureux

L’élément principal de cette sculpture est une forme cylindrique disposée à l’horizontal qui se ferme par l’arrière avec un casque en forme de sphère. Cela crée un trou profond d’ombre, autrement dit, un tunnel, comme évoqué dans le titre de l’œuvre.

Cet élément ressemble sensiblement à l’élément central de deux sculptures réalisées antérieurement par González, intitulées Les amoureux I et Les amoureux II . Même si Tête dite « Le Tunnel » est réalisée après ces deux œuvres, il s’agit d’un retour au thème des amoureux dans une version finale, plus élaborée et de plus grande taille.

La décomposition et qualité poétique accrue des formes

Le motif que sert comme point de départ de la série est la trémie formée par deux visages qui s’embrassent, et qui se fondent en une seule tête. Dans Les amoureux (I et II), le baiser-trémie est représenté par la ligne brisée de la coupe d’une planche de fer que l’artiste a soudé à l’entrée du trou. Cette planche coupée se compénètre avec le vide de l’ombre à l’intérieur du tunnel. Dans Tête dite « Le Tunnel », la trémie du baiser n’est pas soudée à la bouche du trou, sinon séparée devant elle, soutenue par une barre verticale. Par ailleurs, la lignée brisée s’est désagrégée, pour se convertir en deux triangles flottants dont les points aigus pointent vers l’intérieur sombre du tunnel.

Même si les formes principales de Tête dite « Le Tunnel » sont globalement géométriques, González souligne le caractère poétique de la sculpture en déformant légèrement les volumes. Il accentue l’impression d’irrégularité moyennant le traitement des textures du fer, martelées et polies doucement dans un tremblement organique, rehaussé par la lumière.

Bâtir impunément sur le vide

Dans un court texte d’introduction au catalogue de l’exposition réalisée en 1934 dans la galerie Percier, le critique d’art Maurice Raynal écrit que “l’audace a poussé González à ne plus considérer seulement le vide comme une sorte de miroir encadré, de lac serti de terres, d’échantillon de ciel bordé de toits de maisons, mais encore comme une manière d’élément solide sur quoi l’on peut impunément bâtir. Comme l’invisible trace d’une flèche enclot une portion d’espace, la ligne d’une lame de fer simplement esquissée, amorcée, trace dans la lumière toute l’élégance d’un corps. Et c’est, dans le vide, quelque chose comme un souvenir concrétisé que la pesanteur et son ancienne horreur du vide suggèrent à nos yeux pour la plus idéale expression plastique”.

Les amoureux II, 1932-33, IVAM Centre Julio González
Texte : Tomás Llorens
Traduction des textes de l’espagnol (Tomás Llorens) et du français (Maurice Raynal) : Amanda Herold-Marme